Titre : Calcutta
Auteur :
Shumona Sinha (Bengale-Inde)
Editeur : Les éditions de l’Olivier
Genre : roman
A travers l’histoire de sa
famille, Shumona Sinha nous fait découvrir l’histoire de sa région indienne
d’origine, le Bengale.
Dans un style original et poétique,
Shumona Sinha nous raconte une lutte sans merci pour la liberté : les
exactions inimaginables d’Indira Gandhi qui éliminait ses adversaires
politiques, la vie souterraine et souvent faite de ruptures des révolutionnaires
marxistes du Bengale, la menace policière occulte, les croyances et pratiques
religieuses.
Ce qui frappe aussi dans ce roman,
c’est, sans aucun doute, l’omniprésence de deux personnages proches de
l’auteure : son père et sa grand-mère paternelle.
Le père de Shumona Sinha,
universitaire, est un des responsables de la résistance. Il se marie sur le
tard à une épouse mélancolique, enseignante aussi, mais sujette aux sautes
cyclothymiques. La grand’mère, à la forte personnalité, a tissé avec son fils
un lien anormalement très fort et réciproque.
Le récit commence par une sorte
d’autobiographie exprimés sous plusieurs points de vue (je et elle). C’est un
retour aux sources propice aux souvenirs. Elle retrouve sa ville, les maisons
de son enfance et chaque objet est un petit caillou du passé (la couette rouge,
l’hibiscus géant, la malle, le braséro). Ces souvenirs ressuscités de la
poussière sont pleins d’émotion.
L’auteur ne se contente pas
seulement de nous retracer l’histoire de sa famille, elle fait aussi ressortir
du passé les histoires ou légendes de l’Inde mythique, comme, par exemple, le
récit de vie d’Ashanti, une favorite, mi prostituée mi femme fatale, mais
aimante et attachée à son amant, un riche personnage aux mœurs dissolus.
Comme cette légende est racontée à
sa petite fille par une grand’mère vieillissante et diminuée, en fin de vie, on
peut considérer son récit comme un regret. Le regret de n’avoir pas vécu comme
Ashanti. D’être passée à côté de grandes folies, de partir bientôt sans avoir réalisé
tous ses rêves.
Au-delà de ce récit,
Shumona Sinha nous confesse son attirance et sa passion des mots qui, pour
elle, recréent un autre univers.
C’est un roman riche, dense qui dévoile une Inde mal connue et un
écrivain de talent.
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Citations
« Le
pouvoir des mots est sans limites, sans faille, il s’impose aux choses, aux
faits, à nos idées et à nos sentiments. Mais parfois les mots sont là pour
mieux faire entendre le silence, l’encercler comme la petite margelle d’un
puits. Dans cet espace limité, le silence devient infini, insondable.» (p.13)
« Les ruptures amoureuses sont parfois comme une fracture, nette,
définitive, parfois comme une déchirure, dans le fatras des doutes et des
hésitations, entre attente et désespoir.» (p.45)
« Ashanti était devenue la favorite du seigneur parmi toutes les
courtisanes. Elle avait envie de prononcer, murmurer, chuchoter mille mots
interdits. Mais elle n’en prononçait aucun, parce que leur lien ne s’y prêtait
pas. Elle aussi aimait ce jeu, les tourments de l’âme, elle aimait enlever une
à une les épines de son cœur, caresser les plaies. Le bonheur ne l’intéressait
pas…c’était de souffrir ensemble, d’alterner le rôle de bourreau et de
victime.» (p.170-171)
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Elle a obtenu en 1990 le prix du meilleur jeune poète du
Bengale. Elle vient s’installer à Paris à 28 ans, en 2001, où elle vit toujours.
Elle a préparé et obtenu un DEA et un master en Lettres
Modernes à la Sorbonne.
Outre plusieurs anthologies poétiques françaises et
bengalies préparées en collaboration avec le poète français Lionel Ray, son
ex-mari, elle a publié 3 romans :
Fenêtre sur l’abîme (édition de la Différence)
Assommons les pauvres (édition de l’Olivier) couronné par le
Prix Valérie Larbaud (2012) et le prix populiste.
Et maintenant Calcutta (édition de l’Olivier) que
nous présentons.
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