Le Centre Francophonie de Bourgogne (CFB) a
découvert, lu et apprécié :
Si les dieux incendiaient le monde (Grasset)
d’Emmanuelle Dourson (Belgique).
Curieux, ce 1er roman de l’autrice belge Emmanuelle Dourson (Prix 2022 de la 1ère œuvre en langue française et Grand Prix du roman de l'Académie Royale de langues et de littératuresrançaises de Belgique (février 2022).
Bien curieuse famille ! Chacun
mène sa vie de son côté et chacun s’accroche à ses certitudes ou à ses chimères !
Curieuse aussi, cette construction inédite
L’auteure nous livre un kaliédoscope
familial. Jean, le père, presque grabataire, est attaché à Nabokov et au petit
tableau de Smargiasi, comme un pendu à son arbre ; Yvan, le mari de
Clélia, n’envisage que la photographie remaniée et un cliché inédit ;
Clélia, l’une de filles de Jean, se cherche par la fuite (amant et projet en
Ethiopie) ; Katia, la petite fille de Jean et fille d’Yvan et Clélia, se
plonge dans l’Odyssée et le personnage d’Ulysse, un héros de compensation et cherche
sa mère dans ses robes et soutien-gorge.
En réalité, chaque membre de cette
famille est en manque. Et tout le monde a quelque chose à se reprocher. On
assiste à une sorte de confession collective, comme une culpabilité congénitale
sur fond de péché originel et de pénitence : « Toujours souffrir,
jamais sortir ». Le remords ronge inéluctablement cette famille.
La mère, Mona, décédée, parce
qu’obsédée par les lacs froids profonds et inaccessibles, regrette de ne plus
être présente. Albane, l’autre fille de Jean, pianiste de talent, noie dans la
musique classique, sa jalousie et la trahison de Jean. Jean et Clélia se
demandent si Albane acceptera de se réconcilier avec eux. Pourtant ce sera
elle ou la musique, qui rassemblera une partie de la famille par son concert
de piano à la Palau de la Musica, à Barcelone.
Curieuse la construction de ce
récit. Tout le monde parle en même temps, même Mona, la morte intervient sans
qu’on lui demande son avis. Et tout le monde tire la couverture à lui et se
penche sur son propre sort.
Ce roman diffracte le temps et
l’espace, mélange allègrement légende et réalité, passé et présent, bouscule
morale et bonnes mœurs. Descriptions exceptionnelles, acuité visuelle et
olfactives hors pair et quelle beauté, en finale, cette présentation du concert
de piano, dont la sonate 32 opus 111 de Beethoven !
Nul ne saura jamais « si les
dieux incendient le monde », mais assurément, cette jeune auteure de
talent incendie ses lecteurs.
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