22 décembre 2025

La cuisinière du Kaiser (Robert Laffont) Armel JOB (Belgique)

 

La cuisinière du Kaiser (Robert Laffont)

                                          Armel JOB (Belgique)





               

Le romancier belge, Armel JOB, fin psychologue et auteur de romans de policiers de grande maitrise, nous livre avec « La cuisinière du Kaiser », une saga familiale, insérée dans un pan de l’histoire européenne, côté Belgique, fin 19ème siècle, début 20éme siècle.

               Comme à chaque titre, Armel JOB charpente son récit autour d’une figure féminine marquante, ici, c’est Magda, l’arrière- grand-mère de l’auteur.

               Dans un récit précis, détaillé et méticuleux, Armel JOB, nous plonge dans une famille où la petite histoire familiale est malmenée par l’Histoire, la grande, en l’occurrence, le conflit d’une partie de l’Europe et l’Allemagne, puissante à cette époque puisqu’elle vient de vaincre et ridiculiser l’empereur des Français, Napoléon III, à Sedan en 1870.

                Propriétaire du Grand Hôtel des Ardennes, bien en vue, Magda et Victor, son époux, reçoivent une clientèle aisée, dont des touristes allemands.

                Magda originaire d’une province belge germanophone comprend la langue et entre facilement en contact avec ses clients allemands.

                Si l’infidélité de Magda dissout le couple, les troupes allemandes passant par la Belgique en 1914, pour contourner la défense française, causent un drame familial qui affectera Magda et déterminera tout son comportement par la suite.

                C’est ce récit sensible et douloureux que nous narre Armel Job, un pan de son histoire familiale éloignée.

                Un bon roman.

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Issu une famille modeste imprégnée de l’ancienne culture wallonne. Son père fut matelassier ambulant puis marchand grainetier.

Il est licencié-agrégé de philologie classique de l’université de Liège.

Il enseigne le grec et le latin pendant vingt ans, devient directeur de son école avant de quitter l’enseignement pour l’écriture.

La Rencontre (édition Encretoile) de Yveline RICHARD (Le Creusot/France)

 

Le Centre Francophonie de Bourgogne a lu et aimé

La Rencontre (édition Encretoile) de Yveline RICHARD (Le Creusot/France)



                   


             Rafaîchissante histoire d’amitié entre un enfant handicapé, bloqué sur son fauteuil et un agile corbeau tout attentionné.

           Télescopage aussi entre le regard de la société sur ce volatile jugé dangereux -n’est-il pas noir et fossoyeur ? appelé ici « saloizô » par la maman inquiète et cette amitié réconfortante qui s’installe dans ce récit.

         « Saloizô » est en réalité, « petit roi » pour ses parents. Orgueilleux, prétentieux, méprisant pour les autres ; seul, Vieux CO, le chef de la communauté des corbeaux lui laisse sa chance.

          Il faut à « saloizô », l’image du petit Théo, coincé dans son fauteuil, l’attitude bienveillante de Max, son frère, le regard affectueux de Béatrice, la maman et surtout, ce petit lapin bleu en peluche qui tombe sans cesse, pour attendrir « Saloizô »/«petit roi ».

        C’est une belle histoire qui met à mal les préjugés, les raccourcis et qui montre qu’une rencontre sans arrière-pensée peut avoir lieu entre des êtres différents.

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Yveline demeure en Bourgogne ; ancienne directrice d’école maternelle et conseillère pédagogique, elle a aussi publié des ouvrages jeunesse aux éditions Yambow El Kitab (Maroc). Pays où elle intervient pour des formations professionnelles.

 Voici la 3ème entrée de livres de ce fin décembre 2025














La nuit au cœur » (Gallimard) de Nathacha APPANAH

 

La nuit au cœur » (Gallimard) de Nathacha APPANAH

          Trois récits révoltants, trois drames de la violence familiale. Un roman puissant.

Un plongeon émouvant et pathétique dans l’histoire d’Emma et Chahinez, jusqu’à leur fin et celle de Nathacha, qui, elle, a survécu.

Nathacha APPANAH, avec précision, pudeur et honte, nous rend témoin, de ce qu’ont vécu, en elles-mêmes, ces femmes victimes.

Un calvaire en déshumanisation.




Une reine sans royaume » d’Hella FEKI (Tunisie).

 

Le Centre Francophonie de Bourgogne (CFB) a lu et beaucoup aimé « Une reine sans royaume » d’Hella FEKI (Tunisie). 






















                Un roman rafraichissant écrit de belle manière, avec tendresse et compassion, pour cette reine au destin fracturé.

Situons les faits

                Ranavalona III, jeune femme d’origine noble, habituée à la liberté d’aller, voit son avenir se restreindre, quand la nécessité royale l’oblige à devenir reine.

                Désormais enfermée dans son Palais, tenue aux rites ancestraux, veuve d’un vieil homme et obligée de se remariée à un 1er ministre qui veut garder le pouvoir. Son quotidien est sombre, un peu embelli par un amour profond clandestin.

                Mais l’île est occupée par la France qui impose sa loi. Des révoltes éclatent, un peu partout sur l’Île et Gallieni, général rigide et impitoyable, redoutant la connivence de la Reine avec les émeutiers, la dépose le 27 février 1897 et l’exile à Alger.

                Ranavalona III est le fil rouge qui nous dévoile, à la fois, la prégnance sociale de la royauté malgache, la réalité d’une occupation coloniale, la révolte de populations sévèrement réprimée, la vie en France fin 19ème et début 20ème siècle.

             Etonnant, Hella fait apparaitre, à Tunis, (car d’Alger, Ranavalona se rendit plusieurs fois à Tunis), un foyer culturel cosmopolite et actif où des femmes évoluées repensent le monde à travers plusieurs salons. En avance pour cette époque, on y parle du droit des femmes, de leur liberté individuelle et de leur épanouissement.

            Hella FEKI, nous fait aimer cette reine. Et l’emploi du « je » nous la rend plus réelle. Le lecteur prend fait et cause pour « cette Reine sans royaume », ouverte au monde, fragile, ballotée par des forces extérieures, consciente de l’évolution du monde qui se fera sans elle. Beau style. Roman bien documenté.

         On notera le précédent roman d’Hella FEKI que le CFB a aimé: « Noces de jasmin » (J.C.Lattès) qui relate la révolution des jasmins en Tunisie,



TOUISA (édition Al Manar) de Halima HAMDANE (France/Maroc)

 

TOUISA (édition Al Manar)

                  De Halima HAMDANE (France/Maroc





            C’est un roman hybride que nous offre la talentueuse conteuse d’origine marocaine, Halima Hamdane.

            Touisa, c’est en fait la soirée hebdomadaire, généralement le dimanche soir, des gardiens -pauvres et exploités- des villas luxueuses. Touisa, un rendez-vous incontournable autour d’un repas où les gardiens font le point ou se querellent.

              Halima nous présente cinq gardiens, cinq vies souvent de misère, cinq parcours différents avec pour l’un deux, Mostafa, un séjour en France qu’il enjolive en contradiction avec la vie compliquée qu’il a vécue.

           L’auteure associe la vie de ces gardiens à celles des occupants, surtout la villa de Jacques qui a dû repartir en France, que deux femmes viennent de louer. Dans cette villa, sur un mur dans une pièce, est fixé le portrait d’un homme qui interpelle Abdou, le gardien, Abdou. Portrait ressemblant étrangement à celui de son père, disparu, et dont sa famille marocaine lui a remis, une photographie vieillie.

            Dans ce roman, Halima en profite pour jeter un regard lucide sur la société marocaine : le patriarcat, la situation des femmes, l’immigration (la vie déchirée de Mostafa, un des gardiens) et l’écart entre les riches et les pauvres, la majorité.

           En réalité, ces récits de vie se transforment en contes, sortes de paraboles à caractère moral ; car Halima y plante, à chaque situation, une histoire qui, comme dans les fables de La Fontaine, se termine par une morale, façon de prendre de la hauteur face aux fâcheries de la vie, sur le chemin difficile de la sagesse.

          Roman agréable et instructif qui, comme dans de nombreux contes, se construit par enchâssement. Un plaisir de lecture.

Passagères de nuit (Sabine Wespieser) de Yanick LAHENS (Haïti)

 

                            Passagères de nuit (Sabine Wespieser)

                             De Yanick LAHENS (Haïti)




Stupéfiant, ce beau et grand roman « Passagères de nuit » (Sabine Wespieser) de Yanick LAHENS (Haïti).

            Beau par le style travaillé, et grand par ce fil historique qui relie les affres du passé à la lutte silencieuse de ces deux femmes.

            Un fois le livre, en deux parties, refermé, une image s’impose au lecteur. Une sorte de halo lunaire, comme si ce récit se déroulait au milieu d’une lune gibeuse.

            Et de cette semi obscurité surgit deux figures de femmes : Elisabeth et Régina, deux résistantes silencieuses et déterminées.

          « Passagères de nuit » est une métaphore, en image triple : le sort de ces femmes, souvent abusées, dans les cales sombres des bateaux négriers, Haïti malmené par le destin violent, depuis des siècles et enfin, la vie des femmes noires ou métisses au sein des sociétés esclavagistes ou post esclavagistes.

         Malgré tout, des halos d’espoir. Une résistance silencieusement opiniâtre et le désir chevillé au corps de ne jamais se soumettre au désir d’un homme.

        Comme soutiens : « le mouchoir-ciel », sorte de protection symbolique à laquelle on croit et l’attachement aux forces invisibles, mais salvatrices du Vaudou, comme des potomitan, dans un présent sombre.

          Il faut lire et relire « Passagères de nuit » où le style, l’histoire et les mots forment cette image de halo.

           Deux femmes en lutte silencieuse qui s’émancipent « entre ciel et eau, force et foi » (p.119). Un plaisir de littérature

 

Citations

(p.212) Le courage des vaincus prend racine dans l’invisible, l’humide, le noir de la terre. Ma vie entière a été un pied de nez aux vainqueurs.

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